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29 avril 2024 1 29 /04 /avril /2024 04:34

Le texte qui suit concerne l’avenir de la médecine non pas en termes médicaux mais en termes de dispositifs organisationnels de production de la santé. Quel type institutionnel et organisationnel verra le jour - toutes choses égales par ailleurs - dans les prochaines années ?

 Le lecteur pressé pourra ne  lire que la dernière rubrique : « ce qu’il faut retenir ».

Quelques notions singulières pour éclairer le paradigme médical.

La médecine est tout d’abord une production de soins intégrables dans ce qu’on appelle le coût de la vie. Dans un idéal capitaliste tel que Marx l’avait imaginé, c’est l’importance des dépenses des salariés qui correspond à ce coût de la vie. A l’époque moderne ces dépenses sont effectuées dans des entreprises où le salarié achète ses biens de subsistance et donc des biens qui selon le langage de Marx vont assurer la « reproduction de sa force de travail ». Toujours selon le langage de Marx, les biens correspondants sont appelés « biens salaires » et correspondent au « coût de la reproduction de la force de travail ». Très simplement si les prix des « biens salaires » augmentent, le coût de la vie augmente et en toute logique les salaires doivent augmenter. Tout aussi simplement si les « biens salaires » sont produits dans des conditions d’efficience croissante, ce qu’on appelle gains de productivité, les prix doivent logiquement diminuer, donc aussi le coût de la vie et donc tout aussi logiquement les salaires.

Ce qui a fait historiquement le succès du capitalisme est précisément cette capacité à l’efficience croissante qui a permis en longue période une baisse de valeur de tous les biens nécessaires à la reproduction de la vie qui, associée à des salaires qui ne vont pas baisser dans les mêmes proportions, vont permettre ce que Marx appelait « l’embourgeoisement de la classe ouvrière ». Parmi ces « biens salaires » il y a eu une place croissante pour les produits et services de santé. De façon un peu savante on dira que les dépenses de santé font partie du coût de la reproduction de la force de travail. Et si en capitalisme moderne ce coût est mutualisé au niveau de la puissance publique, on comprendra qu’il est surveillé voire contraint.

Historiquement, le capitalisme génère l’établissement et la généralisation du salariat : les travailleurs de naguère qui maitrisaient leur outil de production, terre, outils de l’agriculture  et de l’artisanat, deviennent des salariés c’est à dire des personnes obligées de se vendre à d’autres personnes qui elles maitrisent les outils nouveaux de production (machines de l’industrie). C’est ce que, en capitalisme, Marx appelait le processus de séparation des travailleurs de leurs outils de production.

Tout aussi historiquement le capitalisme occidental n’a fait que générer d’énormes gains de productivité dans les branches assurant la reproduction de la vie , y compris en utilisant un recours massif à des externalités (la mondialisation) permettant d’utiliser une force de travail dont le coût de la vie était beaucoup plus faible. D’où cette anomalie que nous vivons aujoud’hui, c’est à  dire un Occident qui utilise massivement des importations d’un « sud global» pour reproduire la vie de ses salariés. Nous avons déjà noté ce fait dans un article précédent[1] en précisant que mêmes les produits vivriers (agriculture) devaient être de plus en plus importés pour faire face à l’abandon programmé de cette même agriculture. On pourrait en dire autant des produits médicaux, ces « biens salaires » que l’occident ne produit plus car ils permettent de baisser le coût de la reproduction de la force de travail occidentale : principes actifs, antibiotiques, masques, etc. Même cette catégorie de « biens salaires » voit sa production déléguée au « sud global ».

Et la médecine dans tout cela ?

Dans ce vaste mouvement historique qu’en est-il de la médecine ? Pendant très longtemps, les médecins furent des artisans maitrisant leur outil de production au service de la vie des nouveaux salariés du capitalisme naissant. Leur service assurant la vie (et son coût) était très limité quantitativement. Ainsi même en capitalisme déjà affirmé et développé il n’y avait en France que 119 « médecins artisans » pour 100000 salariés en 1968, alors qu’il en existe aujourd’hui 318. L’outil de production correspondant était lui-même relativement limité ( peu d’analyses, peu de chirurgie, peu d’imagerie, etc.) et, en dehors de l’hôpital,  l’outil restait la propriété du « médecin artisan ». Comme jadis pour l’artisan tisseur ou fileur.

Logiquement si la santé est un « bien salaire » comme les autres, il devrait, comme les autres, devenir un bien produit dans l’ordre organisationnel capitaliste. Un ordre assurant par le biais de technologies sans cesse plus efficientes une reproduction de la vie de plus en plus rationnelle et efficiente. Tout aussi logiquement il faudrait donc s’attendre à ce que l’ordre artisanal médical disparaisse comme l’ordre artisanal classique devait disparaître au 19ème siècle. Cela signifie aussi, comme au 19ème siècle, la séparation des médecins de leur outil de production et le passage au salariat classique de la grande industrie moderne.

Les choses sont pourtant beaucoup plus complexes et si en longue période les effectifs des artisans classiques se sont effondrés alors que ceux des « artisans médecins » se sont accrus c’est en raison de la nature réelle et symbolique du travail de soins. Les médecins et leurs patients se sont toujours considérés en dehors du champ de l’économicité et sont restés des résistants. Une résistance qui, touchant l’ordre politique, s’est matérialisée par une association privé/public qui existe encore. Même dans l’ordre capitaliste établi, il existe un statut du médecin, lui-même engendré par une réglementation stricte. En France, l’exercice de la médecine est très encadrée et les médecins - mêmes ceux juridiquement salariés dans les hôpitaux - ne se considèrent pas comme des cadres de l’industrie. La rémunération est elle-même assurée par la puissance publique, ce qui nous éloigne de la logique du marché. Mieux, les médecins se sont battus pour construire une rente de monopole, ce qu’ils ont obtenus en 1972 avec l’introduction d’un numerus clausus au titre des études de médecine. Cette rente de monopole, si elle existe, mérite élucidation.

La construction politique d’une rente de rareté médicale.

Dans la théorie économique classique, on parle de rente de monopole lorsqu’une asymétrie de marché se construit autour d’une insuffisance de l’offre par rapport à la demande. Dans ce cas, un offreur (ou plusieurs qui se regroupent) obtiennent sur le marché un surprofit par rapport à celui qui se manifesterait sur un marché classique. Le surprofit devient ainsi une rente de rareté. Dans le cas de la santé, cela supposerait une offre insuffisante de services de médecins par rapport à une demande de patients. Or, de ce point de vue, il n’y aurait  pas eu, au moins jusqu’à une date récente, de rareté médicale en France. Ainsi les quelques doyens de faculté de médecine qui considèrent qu’il ne faut pas faire disparaître le numerus clausus ont raison de souligner que le nombre de médecins s’est considérablement accru[2]. Répétons les chiffres :119 médecins pour 100000 habitants en 1968 contre 318 en 2020. Par contre, ces adeptes du monopole que sont certains doyens oublient de signaler que la demande de soins s’est considérablement développée : les dépenses de santé sont ainsi passées de 2% du PIB dans les années cinquante à plus de 12% aujourd’hui, ce qui est un signe parmi d’autres de ce que Marx appelait « l ’embourgeoisement de la classe ouvrière ». Clairement la « reproduction de la force de travail » exige aujourd’hui un panier de « biens salaires » beaucoup plus lourd et complexe que dans les années 50. Si l’on compare ainsi les chiffres de la quantité de soins demandés par rapport à l’offre médicale en tant que force de travail déployée à l’entretien de la vie, il y a bien eu irruption d’une pénurie politiquement programmée dans le dispositif du numerus clausus. Alors que les dépenses de santé vont dans les années 70 se déployer à un rythme de 10% l’an, le numerus clausus va fondre : 8588 places  en 1972,  6423 en 1981,  4000 en 1990 ,3850 en 2000[3]. De quoi voir des présidents d’Universités et des doyens devenir acteurs/spectateurs de facultés de médecine fonctionnant à rendements décroissants : plus de moyens contre moins de production et ce depuis cinquante ans…Nous sommes très loin de la proposition d’un premier ministre qui fixe à 17000 le nombre de places en seconde année pour l’année 2025… Bien sûr on peut penser que les coûts du service de soins augmentent avec leur qualité, toutefois nous étions dans une période où la population s’accroissait et vieillissait. Il y a donc bien eu un effort politique de construction d’une rente de rareté : blocage à terme de l’offre contre augmentation de la demande. Effort politique qui, semble-t-il, n’est pas terminé si l’on entend certains doyens peu attirés par des flux considérables d’étudiants en seconde année.

La dissipation de la rente de rareté médicale.

Restés globalement artisans sous tutelle administrative, les médecins n’ont pourtant pu bénéficier de la rente de rareté. Probablement co-auteurs de la construction de la rente avec les entrepreneurs politiques, ils n’ont pu obtenir le surprofit de rareté en raison d’un blocage des revenus administrativement fixés. Ce n’est pas le marché qui fixe le tarif de la consultation mais une décision politique. En même temps une autre décision politique fixe un prix proche de zéro au titre de « l’achat » de la consommation de soins. Il en résulte logiquement un étranglement avec une demande qui tend vers l’illimité et une offre bloquée : le temps de consultation ne peut que diminuer (16 minutes aujourd’hui) et les dépenses en termes de produits médicaux augmenter. Par effet de diffusion, la rente de rareté se dissipe sur les marchés financiers, d’abord  par le vecteur des déficits publics  qui, eux-mêmes, deviendront objets de rémunération financière. Le jeu de la collaboration privé/public est difficile et dès qu’il y a construction d’une rente de rareté il est très difficile d’empêcher son voyage jusqu’aux marchés financiers.

Le passage au capitalisme de l’industrie du soin.

Il n’y avait aucune raison que le statut « d’artisan médecin » ne se transforme pas en statut de salarié de la grande entreprise médicale. C’est ce à quoi nous assistons aujourd’hui avec toutefois le même paradigme de l’association privé/public.

Il y avait  déjà des médecins salariés dans cette grande entreprise qu’était l’hôpital. Mais ces médecins en question ne se sont jamais sentis salariés et ont parfois pu négocier la rente de rareté avec l’autorité administrative : refus d’une intégration au premier échelon du statut pour les jeunes médecins, refus net du salariat et négociations d’une intermittence avantageuse, etc. Culturellement, ils ne sont jamais devenus des cadres d’entreprise et ont toujours contesté un ordre organisationnel et la rareté de l’outil de travail dont le volume était politiquement fixé.

 La finance de marché soucieuse de valorisation vient ainsi depuis quelques années proposer un autre paradigme. Profitant du fait que la médecine nouvelle exige une énorme consommation de capital (l’outil de production est devenu très sophistiqué et très couteux) et capital que peu « d’artisans médecins » peuvent rassembler, il devient logique de passer au capitalisme financiarisé que l’on trouve dans nombre de branches industrielles classiques. Près de deux siècles après la première révolution industrielle, les « artisans médecins » vont se voir séparés de leur outil de production et devenir, pense-t-on, de véritables cadres d’entreprises médicales. Les soins médicaux sont devenus des « biens salaires » comme les autres et comme les autres ils doivent être produits selon une efficience croissante. Et il est vrai que les nouvelles technologies permettent des gains gigantesques d’efficience (pensons par exemple à la greffe de l’intelligence artificielle sur les gros outils de diagnostic).

C’est ainsi que 15 à 20% des cabinets d’imagerie sont maintenant sous contrôle de fonds d’investissements. C’est ainsi que 75% des établissements de biologie médicale sont sous ce même contrôle. Plus généralement les centres de soins sont de plus en plus sous contrôle de groupes eux-mêmes dépendants de structures financières. Plus généralement encore la finance, déjà bénéficiaire de l’énorme liquidité générée par le couple Etat déficitaire/banque centrale devenue imprimerie monétaire,  est à la recherche de produits sécurisés. La branche santé qui vit déjà dans l’autre couple privé/public devient ainsi un lieu d’investissements privilégiés. En particulier, le marché est protégé par la rareté de son produit et l’assurance d’une demande directement financée par des fonds publics. C’est ce qui explique que les structures anciennement artisanales se vendent à prix élevés : Le vendeur commercialise la rente qui se cache derrière l’assurance de chiffres d’affaires garantis, tandis que l’acheteur voit un premier gain de gestion assuré par le passage d’une organisation artisanale à une organisation industrielle plus efficiente, et un autre gain garanti par l’assurance d’un chiffre d’affaires sécurisé et se spécialisant vers les actes les plus rentables. En ce domaine, la finance ne fait que suivre un chemin déjà commencé il y a très longtemps par le rachat d’ehpads artisanaux qui se sont greffés  à de grands groupes. En la matière, une partie du médicosocial avait de l’avance sur la santé. Globalement, la recherche de rente qu’autorise les structures complexes où cohabitent nécessairement le privé et le public, est particulièrement active  et la santé est devenu le premier poste d’investissement des sociétés financières françaises : 20% du montant investi quand la santé ne pèse que 12% du du PIB[4].

 Il en résulte que pour les structures qui se vendent La conséquence est évidemment la perte de liberté comme l’était au dix-neuvième siècle la perte de l’autonomie de l’artisan du textile devenu simple force de travail dans la grande manufacture qui allait l’employer. Dans le domaine de la santé il s’agira de l’orientation de l’activité vers des pathologies les plus rentables et le recul du souci du service public. Cette tendance générale se heurtera toutefois à la rente de rareté : le nombre de médecins va encore diminuer pendant plusieurs années et il ne sera pas facile de les transformer en cadres de l’industrie. Ils seront probablement aidés en cela par le régulateur.

Ce qu’il faut retenir.

Artisans et paysans sont devenus avec la Révolution industrielle des forces de travail salariées ne contrôlant ni l’outil de production ni les marchandises produites. Cette perte de contrôle est la spécificité du capitalisme. Les « artisans médecins » en voie de salarisation perdront le contrôle de l’outil de production mais ne sont pas éthiquement prêts à perdre la responsabilité de ce qu’ils produisent. Ils sécurisent ou tentent de sécuriser  cette responsabilité en organisant consciemment ou inconsciemment leur propre rareté. Ils tenteront de partager la rente de rareté avec une finance qui ne paie pas la prime de risque dans un secteur où la puissance publique garantit chiffre d’affaires et rentabilité.  Le premier ministre risque de nombreuses  difficultés à mettre fin à cinquante années de  rendements décroissants dans les facultés de médecine.

                                                                                   Jean Claude Werrebrouck

 

 

[1] Cf : http://www.lacrisedesannees2010.com/2024/02/crise-agricole-moins-bavarder-dans-les-salons-et-davantage-reflechie.html

 

[2] Cf l’article des Echos du 24/4/2024 : « déserts médicaux : la fausse réponse du numérus clausus ». Texte signé par un doyen de médecine (Loic Josseran) et un sociologue (Serge Guérin).

[3] Cf : http://www.lacrisedesannees2010.com/2022/08/sante-les-6-ministres-qui-ne-voulaient-pas-voir.html

[4] Cf France invest ; « La financiarisation dans le secteur de la santé : tendances enjeux et perspectives » ;Yann Bourgueil et Daniel Benamouzig ; Sciences POChaire Santé ; 2023.

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18 août 2022 4 18 /08 /août /2022 08:44

Le quotidien « Le Monde »  publié dans son numéro du 13 août » une interview des 6 ministres de la santé qui se sont succédés au cours des 20 dernières années. Beaucoup de champs de difficultés sont abordées de façon séparée et donc sans étude des liens pouvant les unir et surtout les hiérarchiser. Or, manifestement il doit exister des relations type causes/ effets entre liberté d’installation, accès aux urgences, numérus clausus, obligation de gardes, tarification, etc.

Les ministres disposaient de l’information.

De ce point de vue, il parait assez évident que l’une des causes premières est le numérus clausus instauré en 1971 et appliqué en 1972. Instauré sous l’impulsion du syndicat autonome des professeurs de médecine, le numérus clausus devait régulièrement baisser et passe de 8588 en 1972, à 6423 en 1981, puis à 4000 en 1990 et à 3850 en 2000. Ces décisions prises annuellement par les ministres de l’époque ne pouvaient être aveugles. De ce point de vue, les lois de la démographie sont d’une grande simplicité et d’une très grande fiabilité. Ainsi, on savait que cette baisse était pourtant associée à une hausse très prévisible de la population à soigner : 66 millions en 2020 contre 52 millions en 1972. On savait aussi avec une grande précision que le phénomène du  baby boom limité dans le temps entrainerait un vieillissement de la population très aisé à anticiper : 13% de la population de plus de 65 ans en 1972 contre 20% aujourd’hui. On n’ignorait pas non plus dès les années 70 que l’industrie médicale allait se spécialiser et introduire une division technique des fonctions faisant que la plupart des pathologies entrainerait une multiplication des actes et ce, pour le plus grand bien des patients. Et une multiplication faisant aussi décroître le nombre de médecins généralistes lesquels passeront de 94261 à 87801 entre 2010 et 2018. On savait aussi - dès les années 70 - que l’augmentation de l’espérance de vie découlant des progrès médicaux entrainerait une surconsommation médicale pour les âges de plus en plus élevés. Nul dans l’entourage des ministres ne devait ignorer ces faits d’une très grande banalité. Et donc quand Madame Busyn s’est déclarée au Monde « paniquée » lorsque ses équipes lui ont  présenté quelques courbes démographiques, il y a lieu de s’interroger.

On savait peut-être moins dans les années 70 que le temps de travail en France allait diminuer. Pour autant cette diminution était déjà en cours. S’agissant des cadres cette baisse fut de 10% et donc si l’on considère que les médecins sont des cadres il est normal d’imaginer que le temps passé aux soins devrait aussi diminuer de 10% pour les médecins. Les médecins ont aussi le droit de connaître une vie meilleure et plus équilibrée.

Compte tenu de la seule augmentation de la population (26%) et de la diminution logiquement attendue du temps de travail (10%)  il est possible d’établir le numérus clausus de l’année 2022 sur la base de celui de 1972 à 11679 places, soit davantage que ce qui est prévu dans le nouveau dispositif clausus apertus 2022 (10301 places ). Toutefois si l’on considère les autres facteurs (vieillissement et multiplication des actes par pathologie mais aussi et peut-être surtout le vieillissement des médecins eux-mêmes beaucoup plus âgés que la moyenne des cadres français) il est probable que retrouver la capacité de 1972 supposerait un chiffre très supérieur…. Mais, il faut le reconnaitre, sans doute difficile à estimer.  Dans son travail statistique (« Atlas de la démographie médicale en France ») le Conseil national de l’Ordre des Médecins reconnait que le niveau de l’offre de soins continuera à baisser jusqu’en 2025 pour ne retrouver l’offre présente, très insuffisante, qu’en 2030.

Tout ceci était parfaitement connu dès la fin des années 70 et donc les 6 ministres évoqués par « Le Monde » étaient parfaitement au courant de la catastrophe, et une catastrophe que l’on reporte partiellement sur des pays beaucoup plus pauvres en accueillant des médecins étrangers.

Les ministres sont aussi capables de raisonner.

Logiquement, quand une offre baisse et que la demande augmente, nous avons des prix croissants qui viennent rétablir l’équilibre. Ce n’est évidemment pas le cas dans l’industrie du soin puisque le prix est politique et se trouve proche de zéro pour les patients. Dans ce cas apparait une rareté qui devient une rente pour les offreurs et une inaccessibilité pour les demandeurs. La rente de rareté est normalement multidimensionnelle : absence de concurrence entre praticiens, multiplication des actes par unité de temps, renforcement de la puissance négociatrice avec les régulateurs publics ou les hiérarchies : gardes, liberté d’installation, déserts médicaux,  maisons médicales de gardes, tarification d’activités annexes, gestion du temps et management (hôpital, mais aussi Ehpad, SSR, etc). Toutes les questions évoquées par les ministres relèvent de cette multi dimensionnalité de la rente de rareté dont le numérus clausus est la clé ultime.

Cette rente de rareté n’a rien de naturel et se trouve fondamentalement politique. Et il est normal que dans une industrie qui se trouve hors marché et complètement publique, il y ait formation de groupes de pression politiques en quête de rente. Il est donc normal de trouver des syndicats qui, plus discrets que les syndicats classiques de salariés, sont pourtant très puissants en raison de la nature de leur activité.

En ayant connaissance du problème posé et une connaissance remontant à plusieurs dizaines d’années, les ministres qui n’ont abordé que les questions impossibles à résoudre, celles devenues simples conséquences d’un achat politique de rente de rareté depuis 50 ans , se sont faits complices d’une situation. Il ne suffit pas de dire que « l’on  n’avait pas les moyens », que les décisions étaient « prises au-dessus », etc. Quand on connait la réalité du problème et que l’on constate qu’il ne peut être résolu, il faut au moins l’exposer en toute clarté et refuser de participer au grand naufrage des soins : démissionner est un devoir.

Certes, il est encore possible de dire qu’au fond, dans le monde des affaires, des situations de ce type existent et que nombre de cadres peuvent se trouver en difficulté pour des raisons semblables. La différence est pourtant très grande car les cadres sont des salariés qui souvent n’ont pas le choix et doivent assumer une situation de dépendance et en payer le prix moral. Tel n’est pas le cas des ministres qui ne sont en aucune façon des salariés et n’ont pas  éthiquement l’obligation d’assumer une situation de dépendance.

Dans le cas des 6 ministres de la santé, déclarer qu’on ne pouvait rien faire ne peut que questionner.

 

 

 

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11 février 2022 5 11 /02 /février /2022 10:01

 

Branche spécifique du secteur médico-social, les Ehpad constituent aujourd’hui un ensemble fait d’un  mariage institutionnellement complexe entre services  de soins et service d’hôtellerie.  Ensemble connaissant une forte croissance nourrie par le vieillissement de la population, il est aussi fait d’une grande variété institutionnelle avec toutefois un fort grossissement d’un pôle plus strictement marchand. Ce pôle rassemble aujourd’hui environ 29% du total des établissements et connait lui-même une évolution vers une stricte financiarisation de sa gouvernance avec forte présence d’actionnaires issus plus strictement de grands fonds d’investissement.

Ce secteur est aujourd’hui plus spécifiquement observé en raison de difficultés apparues dans plusieurs groupes privés financiarisés.

Le jeu et ses acteurs

Globalement, le service de soins est très largement régulé par des opérateurs publics qui accordent ou non une autorisation d’ouverture d’Ehpad, autorisation qui confère elle-même un droit à l’obtention de dotations publiques, essentiellement celles devant couvrir le service des soins et en particulier la masse salariale du personnel soignant. L’autorisation est donc de fait un actif public faisant l’objet d’un point d’appui facilitant l’investissement capitaliste. Un peu comme un transporteur routier qui, au-delà d’une permission de circuler sur la route, recevrait une subvention au titre de l’usage de ladite route.

Les autorisations d’ouverture et de fonctionnement des Ehpad donnent ainsi lieu à d’intenses compétitions entre opérateurs privés et en particulier les plus importants d’entre eux. La croissance interne est assurée par la demande d’ouverture sur des zones jugées relativement délaissées.  S’agissant de la croissance externe, celle-ci est assurée par simple rachat d’établissements et de son complément indispensable, à savoir l’autorisation publique de fonctionnement comme point d’appui d’accumulation du capital.

Lorsque la rentabilité est relativement faible et lorsque la structure institutionnelle est le fait d’associations, voire de petites PME non financiarisées et donc souvent faiblement pourvues en capital, la capacité à investir est limitée et le processus de croissance est relativement lent. En effet les demandes d’ouverture supposent simultanément des investissements lourds dans la fonction hôtelière. Si maintenant, il s’agit de croissance externe, le prix de rachat a tendance à incorporer cet actif public qu’est l’autorisation, d’où un effet d’aubaine notamment pour les PME : on revend quelque chose que l’on n’a pas acheté. Capacité à investir limitée et coût non négligeable de l’investissement assurent une croissance limitée du secteur et un processus relativement lent de concentration. Au final la croissance globale s’inscrit dans les limites des ressources budgétaires publiques lesquelles sont elles-mêmes limitées par la croissance économique globale. Un dynamisme entièrement nouveau émergera avec la processus de financiarisation.

La financiarisation du jeu et sa dynamique

La financiarisation change fondamentalement les choses et le secteur, dans son ensemble, connait des bouleversements analogues à ceux rencontrés dans l’économie traditionnelle avec le phénomène des start-up rencontré dans la « tech » ou les ruptures de barrière à l’entrée qui bouleversent aujourd’hui les industries les plus traditionnelles. Avec aussi le formidable processus de concentration que l’on rencontre aussi dans les entreprises économiques classiques, processus qui s’est considérablement élargi avec les nouvelles politiques monétaires.

Pour les fonds d’investissement, il est avantageux de s’intéresser à la partie service hôtelier, un service qui s’appuie et qui est protégé par le service des soins, lequel assure une sorte d’élément de monopole sur un espace donné et qui, par ailleurs, est apporteur de ressources financières. Logiquement, un tel dispositif institutionnel fait de public et de privé doit être porteur d’une rentabilité plus élevée, ce qui justifie l’investissement et donc le fort intérêt des groupes financiers pour cette activité ( Comgest, Peugeot invest, Mirova, ICG, Malakoff, Predica, CPPIB, Blackrock, etc). Cet intérêt est lui-même dopé par l’aisance financière procurée par la politique monétaire de la BCE dont le métier semble devenir la monétisation du capital. Désormais une dette publique fortement croissante et continuellement rachetée par la banque centrale provoque une abondance de liquidités dans le secteur financier. Cette abondance est le produite de 2 canaux qui confluent sur les comptes bancaires : celui d’une dépense publique hors de contrôle qui nourrit les comptes des bénéficiaires, et celui du rachat de dette publique par la BCE et vient nourrir directement les comptes de toutes les banques. Cette finance surabondante  va chercher de nouveaux lieux d’accumulation avec si possible une bonne sécurisation et un fort développement potentiel : ce sera celui en particulier du territoire du vieillissement.     On comprend par conséquent que la valorisation boursière des grands groupes d’Ehpad n’a fait que suivre, voire précéder, celle des grandes entreprises elles mêmes en voie de financiarisation. Ainsi, entre 2014 et 2019, la valorisation des groupes privés est passée de 9,5 à 14,5 fois le résultat d’exploitation. Face à l’abondance de capital, le processus de croissance n’a fait que s’accélérer, et une  croissance qui s’est plus spécifiquement orientée vers des rachats notamment en direction des PME ou des associations. Il est en effet évident que l’abondance de capital se heurte aux limitations budgétaires de l’autorité publique, une autorité qui ne peut délivrer de nouvelles autorisations que de façon limitée malgré les besoins d’une population vieillissante. Nous retrouvons ainsi l’idée d’un mariage institutionnel public/privé qui protège et se fait porteur d’une rareté autorisant des valorisations de plus en plus importantes au niveau des rachats. A l’inverse du monde de l’économie classique où des innovateurs doivent veiller simultanément à la croissance du marché et à celle de leur part de marché, (ce que l’on vérifie par exemple pour TESLA), dans le secteur des Ehpad, la stratégie de la croissance de la part de marché est dominante. D’où aujourd’hui un énorme processus de concentration, processus copiant celui rencontré dans le monde de l’entreprise classique. Notons toutefois que ce processus de forte concentration reste enracinée dans la partie la plus rémunératrice du marché, et les groupes financiarisés dirigent leurs très abondants capitaux vers les usagers les plus aisés. Nous retrouvons ici le thème très débattu de la corrélation entre financiarisation et croissance des inégalités, inégalités ici biaisées par le caractère très captif, voire soumis de la clientèle : on est peut-être riche mais on est complétement dépendant et donc dans un rapport complètement asymétrique avec l’institution.

 

Les pratiques organisationnelles et managériales qui ont été révolutionnées avec la financiarisation dans le monde de l’économie classique, sont aussi révolutionnées dans les Ehpad. Et cette révolution est d’autant plus impérative que les rachats sont chers et doivent par conséquent être suivis de gains de productivité. On comprend ainsi mieux les malaises des personnels qui œuvrant depuis longtemps dans des associations ou des PME vont connaître une véritable révolution des pratiques professionnelles. Malaise que l’on va retrouver dans les directions des établissements qui doivent elles aussi se plier aux pratiques détaillées d’un « reporting » de plus en plus exigeant et surtout bureaucratique (construction de « scores » nourris par plusieurs centaines d’indicateurs devenus autant de codes néo-tayloriens). D’où un sentiment de déqualification souvent rencontré qui reproduit celui constaté dans l’entreprise économique classique soumise au néo-libéralisme financier . Les actionnaires qui ont exigé la rationalisation extrême des pratiques dans l’économie classique se font tout aussi exigeant dans le secteur des Ehpad. Ils peuvent exiger l’automatisation des processus à l’instar de ce qui est rencontré dans les entreprises. Tel est le cas par exemple de ce verre d’eau connecté qui permet de vérifier à distance si la personne en fin de vie n’a pas oublié de s’hydrater correctement. Ce cas, et sans doute beaucoup d’autres, sont évidemment extrêmes et proviennent d’un mimétisme coupable avec ce qui se passe dans les processus industriels. Un service à la personne qui est  bien plus un lien social qu’un processus,  ne peut accepter l’insupportable fuite en avant du « technologisme ». Pour autant ce « technologisme » apparait comme la solution de court terme face à un métier dont il est difficile d’extraire en permanence des gains de productivité. La finance adaptée à la logique des rendements continuellement croissants de l’industrie, voire de la « tech » ( cout marginal souvent nul) se heurte à des couts marginaux souvent constants : produire davantage de service à la personne en fin de vie suppose un accroissement de cout. Nous sommes par conséquent situation particulière où il faut permanence gérer la contradiction entre technologie (exigence de la finance)  et lien social (exigence du client captif).

Comment corriger une telle situation ?

En premier lieu, offrir une résistance à la financiarisation n’est pas simple car la finance, même labellisée « ESG », même « durable », même « inclusive », est elle-même surveillée par des agences de notation, et voit globalement dans le monde des Ehpad un terrain de jeu relativement sécurisant, donc un terrain à privilégier. Le mariage avec l’acteur public offre une belle garantie et les incidents nombreux et largement médiatisés rencontrés dans les établissements donnent lieu à une volatilité des cours sur laquelle peuvent surfer les grands traders et spécialistes de la vente à découvert. Une forte volatilité dépourvue de drame  - le résultat économique est quasiment garanti-  constitue un merveilleux terrain de jeu aux gains financiers considérables. Des gains qu’il faut partager avec les opérateurs concrets de la financiarisation, opérateurs culturellement éloignés du monde traditionnel du secteur médicosocial : managers très proches de l’entreprise néolibérale voire en provenance de cette dernière, hauts fonctionnaires nourris à l’idéologie du « new public management », consultants, évaluateurs, notateurs, juristes, etc. Véritables chargés de mission de la finance, en grande proximité culturelle et économique avec elle, ils assurent l’interface avec les salariés de base désormais soumis à des normes nouvelles. Le haut de la hièrarchie des groupes,  c’est -à-dire les présidents,  directeurs généraux et cadres principaux vont connaitre des rémunérations considérablement plus élevées que celles rencontrées dans la partie non marchande des Ehpad et du médicosocial en général. La finance et ses opérateurs, notamment par le biais de la distribution d’actions gratuites,  sont donc prêts à offrir une résistance considérable au changement. Et même la crise ne met pas fin au jeu ainsi qu’en témoigne la considérable montée de Blackrock au capital d’Orpéa.

De hauts fonctionnaires de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) souhaitent réguler les Ehpad privés par une classique répression financière (Cf Le Monde du 4 février 2022). Il s’agirait de taxer de façon croissante la profitabilité opérationnelle au niveau de chaque établissement (ratio de résultat avant loyer sur chiffre d’affaires). Les Ehpad associatifs où les petites structures ne dégageant aucune profitabilité en seraient exemptés tandis que les grands groupes seraient lourdement taxés. De quoi fortement affaiblir le processus de concentration, de réorganisation, de rationalisation voire de déqualification du travail et du service rendu. Mais aussi de quoi affaiblir les effets d’aubaine et très probablement ne plus apporter sur le marché les capitaux nécessaires à l’ouverture de nouvelles structures. La question devient ici un calcul coût/avantages, entre la perte de capital avancé par la finance et le gain public procuré par la taxation. On comprend ici toute la résistance des grands groupes à l’idée de nationalisation. D’une certaine façon ils ont raison d’affirmer haut et fort que c’est bien la financiarisation qui permet de soulager les dépenses publiques au titre du vieillissement. Cette évidence renforce bien sûr le pouvoir de la finance.

Une autre logique serait celle de la valorisation des résultats non financiers dont se font spécialistes nombre de cabinets de conseils. Nous retrouvons là quelque chose d’équivalent à toutes les questions et problèmes qui, au niveau de l’économie classique, concerne ce qu’on appelle la décarbonisation des bilans. Ici il s’agirait de mesurer la qualité du service rendu avec des moyens que le secteur ne possède pas encore de façon satisfaisante. En effet le contrôle public qui résulte de la surveillance de règles de bonne conduite est encore relativement inadapté, notamment ce qu’on appelle les processus d’évaluation, les contrats d’objectifs et de moyens ou la certification,  tandis que la surveillance actionnariale se focalise essentiellement- malgré de lourds protocoles et codes de conduites de 50 pages- sur les résultats économiques. Les directeurs d’établissements ont ainsi le sentiment d’une surveillance bicéphale, voire d’une double hièrarchie, dont la cohérence n’est pas  établie. Les progrès viendront sans doute d’une mise en cohérence entre les objectifs de soins et ceux de la rentabilité et ce sans passer par la fuite en avant du technologisme. Ils seront toutefois difficiles à construire : les spécialistes de la finance ESG, eux-mêmes surveillés par des agences de notation extra-financières, prennent conscience que le bicéphalisme (autorité publique sur les soins et actionnariat sur les services) ne permettent pas un réel contrôle, d’où la méfiance des investisseurs de base. Cette mise en cohérence supposerait sans doute une vaste transformation statutaire intégrant pleinement l’autorité publique. Ce pourrait être le cas de la transformation en « entreprise à mission » tel que prévu par la loi Pacte de 2019. Un tel changement  supposerait la création d’un comité de mission interne et le recours régulier à un audit externe. Il  suscitera probablement de lourdes questions dans l’ordre juridique. Affaire à suivre.

 

 

 

 

 

 

 

 

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9 février 2022 3 09 /02 /février /2022 10:09

Branche spécifique du secteur médico-social, les Ehpad constituent aujourd’hui un ensemble fait d’un  mariage institutionnellement complexe entre services  de soins et service d’hôtellerie.  Ensemble connaissant une forte croissance, nourrie par le vieillissement de la population, il est aussi fait d’une grande variété institutionnelle avec toutefois un fort grossissement d’un pôle plus strictement marchand. Ce pôle rassemble aujourd’hui environ 25% du total des établissements et connait lui-même une évolution vers une stricte financiarisation de sa gouvernance avec forte présence d’actionnaires issus plus strictement de grands fonds d’investissement.

Ce secteur est aujourd’hui plus spécifiquement observé en raison de difficultés apparues dans plusieurs groupes privés financiarisés.

Le jeu et ses acteurs

Globalement, le service de soins est très largement régulé par des opérateurs publics qui accordent ou non une autorisation d’ouverture d’Ehpad, autorisation qui confère elle-même un droit à l’obtention de dotations publiques, essentiellement celles devant couvrir le service des soins et en particulier la masse salariale du personnel soignant. L’autorisation est donc de fait un actif public faisant l’objet d’un point d’appui facilitant l’investissement capitaliste. Un peu comme un transporteur routier qui, au-delà d’une permission de circuler sur la route, recevrait une subvention au titre de l’usage de ladite route.

Les autorisations d’ouverture et de fonctionnement des Ehpad donnent ainsi lieu à d’intenses compétitions entre opérateurs privés et en particulier les plus importants d’entre eux. La croissance interne est assurée par la demande d’ouverture sur des zones jugées relativement délaissées. Dans le cas des groupes de bonne taille, les coûts de négociation au titre de l’ouverture sont aisément amortissables voire réduits par leurs compétences financières. S’agissant de la croissance externe, celle-ci est assurée par simple rachat d’établissements et de son complément indispensable, à savoir l’autorisation publique de fonctionnement comme point d’appui d’accumulation du capital.

Lorsque la rentabilité est relativement faible et lorsque la structure institutionnelle est le fait d’associations, voire de petites PME faiblement pourvues en capital, la capacité à investir est limitée et le processus de croissance est relativement lent. En effet les demandes d’ouverture supposent simultanément des investissements lourds dans la fonction hôtelière. Si maintenant, il s’agit de croissance externe, le prix de rachat a tendance à incorporer cet actif public qu’est l’autorisation, d’où un effet d’aubaine notamment pour les PME : on revend quelque chose que l’on n’a pas acheté. Capacité à investir limitée et coût non négligeable de l’investissement assurent une croissance limitée du secteur et un processus relativement lent de concentration.

La financiarisation du jeu et sa dynamique

La financiarisation change fondamentalement les choses et le secteur, dans son ensemble, connait des bouleversements analogues à ceux rencontrés dans l’économie traditionnelle avec le phénomène des start-up rencontré dans la « tech » ou les ruptures de barrière à l’entrée qui bouleversent aujourd’hui les industries les plus traditionnelles.

Pour les fonds d’investissement, il est avantageux de s’intéresser à la partie service hôtelier, un service qui s’appuie et qui est protégé par le service des soins, lequel assure une sorte d’élément de monopole sur un espace donné et qui, par ailleurs, est apporteur de ressources financières. Logiquement, un tel dispositif institutionnel fait de public et de privé doit être porteur d’une rentabilité plus élevée, ce qui justifie l’investissement et donc le fort intérêt des groupes financiers pour cette activité ( Comgest, Peugeot invest, Mrirova, ICG, Malakoff, Predica, CPPIB, etc). Cet intérêt est lui-même dopé par l’aisance financière procurée par la politique monétaire de la BCE dont le métier semble devenir la monétisation du capital. On comprend par conséquent que la valorisation boursière des grands groupes d’Ehpad n’a fait que suivre, voire précéder, celle des grandes entreprises. Ainsi, entre 2014 et 2019, la valorisation des groupes privés est passée de 9,5 à 14,5 fois le résultat d’exploitation. Face à l’abondance de capital, le processus de croissance n’a fait que s’accélérer, et une  croissance qui s’est plus spécifiquement orientée vers des rachats notamment en direction des PME ou des associations. Il est en effet évident que l’abondance de capital se heurte aux limitations budgétaires de l’autorité publique, une autorité qui ne peut délivrer de nouvelles autorisations que de façon limitée malgré les besoins d’une population vieillissante. Nous retrouvons ainsi l’idée d’un mariage institutionnel public/privé qui protège et se fait porteur d’une rareté autorisant des valorisations de plus en plus importantes au niveau des rachats. A l’inverse du monde de l’économie classique où des innovateurs doivent veiller simultanément à la croissance du marché et à celle de leur part de marché, (ce que l’on vérifie par exemple pour TESLA), dans le secteur des Ehpad, la stratégie de la croissance de la part de marché est dominante. D’où aujourd’hui un énorme processus de concentration, processus copiant celui rencontré dans le monde de l’entreprise classique.

Les pratiques organisationnelles et managériales qui ont été révolutionnées avec la financiarisation dans le monde de l’économie classique, sont aussi révolutionnées dans les Ehpad. Et cette révolution est d’autant plus impérative que les rachats sont chers et doivent par conséquent être suivis de gains de productivité. On comprend ainsi mieux les malaises des personnels qui œuvrant depuis longtemps dans des associations ou des PME vont connaître une véritable révolution des pratiques professionnelles. Malaise que l’on va retrouver dans les directions des établissements qui doivent elles aussi se plier aux pratiques détaillées d’un « reporting » de plus en plus exigeant et surtout bureaucratique (construction de « scores » nourris par plusieurs centaines d’indicateurs). D’où un sentiment de déqualification souvent rencontré. Les actionnaires qui ont exigé la rationalisation extrême des pratiques dans l’économie classique se font tout aussi exigeant dans le secteur des Ehpad. Ils peuvent exiger l’automatisation des processus à l’instar de ce qui est rencontré dans les entreprises. Tel est le cas par exemple de ce verre d’eau connecté qui permet de vérifier à distance si la personne en fin de vie n’a pas oublié de s’hydrater correctement. Ce cas, et sans doute beaucoup d’autres, sont évidemment extrêmes et proviennent d’un mimétisme coupable avec ce qui se passe dans les processus industriels. Un service à la personne est en effet bien plus un lien social qu’un processus et le « technologisme » comme solution peut devenir une insupportable fuite en avant.

Comment corriger une telle situation ?

En premier lieu, offrir une résistance à la financiarisation n’est pas simple car la finance, même labellisée « ESG », même « durable », même « inclusive », voit globalement dans le monde des Ehpad un terrain de jeu relativement sécurisant, donc un terrain à privilégier. Le mariage avec l’acteur public offre une belle garantie et les incidents nombreux et largement médiatisés rencontrés dans les établissements donnent lieu à une volatilité des cours sur laquelle peuvent surfer les grands traders et spécialistes de la vente à découvert. Une forte volatilité dépourvue de drame  - le résultat économique est quasiment garanti-  constitue un merveilleux terrain de jeu aux gains financiers considérables.

De hauts fonctionnaires de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) souhaitent réguler les Ehpad privés par une classique répression financière (Cf Le Monde du 4 février 2022). Il s’agirait de taxer de façon croissante la profitabilité opérationnelle au niveau de chaque établissement (ratio de résultat avant loyer sur chiffre d’affaires). Les Ehpad associatifs où les petites structures ne dégageant aucune profitabilité en seraient exemptés tandis que les grands groupes seraient lourdement taxés. De quoi fortement affaiblir le processus de concentration, de réorganisation, de rationalisation voire de déqualification du travail et du service rendu. Mais aussi de quoi affaiblir les effets d’aubaine et très probablement ne plus apporter sur le marché les capitaux nécessaires à l’ouverture de nouvelles structures. La question devient ici un calcul coût/avantages, entre la perte de capital avancé par la finance et le gain public procuré par la taxation.

Une autre logique serait celle de la valorisation des résultats non financiers dont se font spécialistes nombre de cabinets- conseils. Nous retrouvons là quelque chose d’équivalent à toutes les questions et problèmes qui, au niveau de l’économie classique, concerne ce qu’on appelle la décarbonisation des bilans. Ici il s’agirait de mesurer la qualité du service rendu avec des moyens que le secteur ne possède pas encore de façon satisfaisante. En effet le contrôle public qui résulte de la surveillance de règles de bonne conduite est encore relativement inadapté, notamment ce qu’on appelle les processus d’évaluation, les contrats d’objectifs et de moyens ou la certification,  tandis que la surveillance actionnariale se focalise essentiellement , malgré de lourds protocoles, sur les résultats économiques. Les directeurs d’établissements ont ainsi le sentiment d’une surveillance bicéphale dont la cohérence n’est pas  établie. Les progrès viendront sans doute d’une mise en cohérence entre les objectifs de soins et ceux de la rentabilité et ce sans passer par la fuite en avant du technologisme. Ils seront toutefois difficiles à construire : les spécialistes de la finance ESG, eux-mêmes surveillés par des agences de notation extra-financières, prennent conscience que le bicéphalisme (autorité publique sur les soins et actionnariat sur les services) ne permettent pas un réel contrôle, d’où la méfiance des investisseurs de base. Cette mise en cohérence supposerait sans doute une vaste transformation statutaire intégrant pleinement l’autorité publique. Ce pourrait être le cas de la transformation en « entreprise à mission » tel que prévu par la loi Pacte de 2019. Un tel changement sera chronophage et suscitera probablement de lourdes questions dans l’ordre juridique. Affaire à suivre.

 

 

 

 

 

 

 

 

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4 août 2017 5 04 /08 /août /2017 07:47

Quand une personne aide un membre adulte de sa famille, incapable d’assumer sa complète autonomie (personne âgée,  ou en situation de handicap, ou malade, ou isolée, etc.) il n’existe  pas – le  plus souvent dans ce type de situation - de relation marchande. L’aidant se trouve ainsi dans une logique de don. N’insistons- t-on pas ici sur les origines anthropologiques et historiques de ce type de relation qui fût clairement analysée, entre autres par Marcel Mauss dès  1925[1]. Par contre, observons que ce type de rapport est fait d’obligation morale, sentimentale, sociale, etc. à caractère durable. La rémunération éventuellement morale de l’aidant n’est pas une rémunération qui, à l’instar de la relation marchande, peut disparaître dès ce qu’on appelle « l’acquittement » : Le fait de payer libère dans une relation marchande de tout lien social. L’aidant est à l’inverse dans une relation, sans doute aussi faite d’échange, mais un échange durable donc plus ou moins stable. Enfin, sa rémunération non monétaire est d’essence non quantifiable.

Dans les sociétés anciennes, les activités de service à la personne étaient régulièrement des activités construites sous l’égide du don dans le cadre des cellules domestiques ou plus largement celui de structures plus vastes comme celles des institutions religieuses voire publiques.

La montée de l’économie et la généralisation de l’échange marchand va de plus en plus questionner les activités de services à la personne. Parce que cette montée fût aussi celle de l’autonomie, de la privatisation de la vie, de l’individualisme, les activités de service à la personne vont être progressivement délaissées pour être reprises par des instances publiques. On remplacera ainsi des épouses attentives, des mères ou des religieuses par des fonctionnaires ou quasi fonctionnaires. Il était évidemment possible d’aller plus loin et de transformer l’intégralité de ces services en services marchands. Bien évidemment, on se heurterait en pareil cas, à un effondrement du périmètre des activités correspondantes puisque seules les personnes fragiles mais durablement en capacité de payer le service, verraient leurs besoins satisfaits. Nous y reviendrons.

L’époque de ce qu’on appelle encore l’Etat-providence fut le moment privilégié de la montée parallèle -et nous pourrions même dire complémentaire- de l’économie et de l’Etat-social qui lui correspond. Parce que désormais le don macro-économiquement gratuit est remplacé par un service fonctionnarisé, il devient macro-économiquement coûteux et suppose des prélèvements sur la partie restée marchande de la société[2]

En même temps, ce coût du service à la personne fragile est très difficile à cerner : quel est le juste périmètre du service ? (Sa surface) et quelle est sa juste profondeur ? Doit-on fixer une limite supérieure aux dépenses de chirurgie pour venir en aide à un souffrant ? Il est aussi très difficile à maitriser car le fonctionnaire ou quasi fonctionnaire chargé du service est en lien avec une pyramide administrative bureaucratique qui connaît de multiples et perverses relations d’agences[3]. Dans le médico- social ou le sanitaire, le « principal » connaît-il les activités réelles et coûts correspondants rencontrés par son « agent » ? Peut-il maitriser les effets pervers de la T2A[4] ? du prix de journée ? de la dotation globale de fonctionnement ? etc.

Parce que, passer de la gratuité dans la société du don correspond à un coût de plus en plus élevé dans la société marchande, la logique de l’Etat-social bureaucratique n’a cessé de se complexifier, de se réformer, de tenter d’optimiser...avec comme conséquence un certain embonpoint. Les marchés politiques se sont naturellement greffés sur cet ensemble d’activités et bien évidemment les gains électoraux se sont largement réalisés sur le segment de marché du mieux disant social.  D’où des difficultés croissantes dans la relation d’agences avec l’introduction de dispositifs de surveillance et de contrôle accrus. Et parce que la relation d’agence est très complexe on verra même le « principal » -agacé par l’opacité des structures de services qu’il a engendrées et dont il a la charge, mais aussi par le clientélisme électoral- imaginer au-delà d’une réflexion sur les coûts, l’introduction d’une réflexion sur les bonnes pratiques des agents. Car effectivement, il y a là un problème : l’aidant était dans le don, mais l’agent est lui dans une relation marchande et ajuste sa qualité de service à la rémunération qui lui est consentie. Nous avons là toute l’histoire des transformations des dispositifs sanitaires et médico-sociaux en France depuis plusieurs dizaines d’années. Avec de fait, cette conséquence assez inattendue : plus la marchandisation du monde se généralise et plus la bureaucratie administrative prend de l’embonpoint. Avec pour conséquence la curieuse et inattendue montée du « back- office » au détriment du « front- office…. ». Plus le monde se libéralise, plus le monde se marchandise plus l’autonomie de chacun devient sacralité…et plus la bureaucratie se développe…

Face à ce grand problème de possibles rendements décroissants[5] (jamais mesuré, ni même imaginé malgré la présence d’agences chargées du coût du fonctionnement de l’Etat type IGAS, Cour des Comptes, etc.) quelles sont les solutions aujourd’hui envisagées ? Elles nous semblent de 2 sortes.

La première, sans doute la plus aisée, est de faire évoluer les bureaucraties administratives vers moins de régulation et davantage de services tarifés. On passe ainsi du coût -toujours mal calculé et toujours suspect- au prix : tel est le cas de la dernière transformation de l’antique service postal qui devient service à la personne âgée isolée. Ainsi l’agent (facteur) devient « ami de la famille » pour une visite hebdomadaire au prix de 19,9 euros par mois. Il peut toutefois se faire encore davantage « ami de la famille » et rendre 6 visites hebdomadaires pour le prix de 139,9 euros par mois. On notera toutefois que cet « ami de la famille » parce qu’il n’est pas anthropologiquement l’aidant traditionnel de la cellule domestique, ne sera pas dans la logique du don et s’acquittera de sa prestation par comparaison avec sa rémunération. Instabilité et quantification sont le prix à payer du basculement vers le monde marchand du service à la personne. Le service à la personne jadis stable et non quantifiable disparait[6].

La seconde est de limiter les effets pervers de la relation d’agence non plus en bureaucratisant toujours plus mais en imaginant un perfectionnement. Prenons l’exemple de l’Hôpital.

Les établissements correspondants sont des structures qui tarifent les services de soins non pas à leurs clients mais à la Sécurité Sociale sur la base de normes dites T2A (tarification à l’activité). Chaque acte est ainsi codé et se transforme en rémunération du service rendu par l’hôpital. Point n’est besoin d’être grand connaisseur de la relation d’agence pour se douter de l’immensité des effets pervers d’un tel dispositif : Quel est l’intérêt de ceux qui codifient l’acte ? (les agents). Et donc le surcodage, la segmentation des séjours à l’hôpital (le patient sort plusieurs fois et revient plusieurs fois, ce qui multiplie les actes), la sélection des patients, etc. sont les effets normalement attendus…et tout aussi normalement surveillés, contrôlés, et sanctionnés par le principal (la Sécurité Sociale). D’où l’allongement de la chaine bureaucratique, les contestations, et l’émergence de nombreux cabinets d’experts nés autour de ladite T2A. Autant d’activités improductives à réduire par un processus d’internalisation de coûts logiquement engendrés et externalisés par l’agent (l’Hôpital) vers son principal (la Sécurité Sociale). Clairement, s’il existait une authentique relation marchande à l’hôpital, les gestionnaires contrôleraient eux-mêmes les coûts afin de ne point subir les pertes de marché engendrées par des prix de marché plus élevés que ceux offerts par la concurrence.

Si l’on va plus loin dans la réflexion sur ce qui doit rester un service public non marchand, il faut prendre conscience que les effets pervers, ce que nous venons d’appeler les externalités, pourraient être contenus par la responsabilisation de l’agent. C’est ce que tente de faire par exemple la Direction Déléguée à la Gestion des Soins (DDGOS) de l’Assurance Maladie avec le dispositif ROSP (« Rémunération sur objectifs de santé publique)

Dans ce contexte nait aujourd’hui l’idée d’une excellence chirurgicale qui serait produite par le passage d’une rémunération du chirurgien non plus à l’acte mais au forfait opératoire lequel viendrait limiter la pratique de la segmentation des séjours et surtout le nombre d’actes tarifés T2A.

 Concrètement des auteurs[7] en viennent à penser que le forfait inclurait le prix de séjour pour l’opération initiale, augmenté du coût des consultations de suivi et celui du traitement des complications pendant une année, divisé par leur fréquence établie sur la base des publications internationales concernant un acte donné. Un tel dispositif constitue une vraie relation marchande au sein même d’un service public, relation qui limite l’externalisation des coûts vers la collectivité quand ce n’est pas vers le patient lui-même.

On peut imaginer la résistance des chirurgiens qui accepteraient mal l’idée d’une amélioration de la qualité d’un service qu’ils jugent corporativement proche de l’optimalité. On peut aussi les comprendre car il deviendrait clair qu’en cas d’évolution profonde de la Sécurité Sociale vers une organisation type Assurance Sociale, la sélection entre bons et moins bons chirurgiens serait le fait de compagnies d’assurances qui, elles- mêmes, optimiseraient leurs sructures de coûts au bénéfice de leurs usagers. Mais ici le service à la personne deviendrait authentiquement marchand avec le risque d’une limitation du service aux seuls usagers capables de payer les clauses des contrats assurantiels (fin du principe Républicain de l’universalité).

Ces 2 exemples montrent que le futur de nombre de services à la personne n’a rien d’évident.

Face aux contraintes macro-économiques dans un monde ayant plutôt choisi la mondialisation (effondrement politiquement organisé, donc volontaire, des Etat-nations) que l’internationalisation (maintien politiquement organisé des souverainetés), l’avenir du service à la personne (essentiellement sanitaire et médico-social) passera plus par les contraintes de marché que par le trop difficile contrôle bureaucratique.

On comprendra aussi que Le choix entre rendements décroissants d’un service à la personne resté public, ou celui d’une fin du principe de l’universalité dudit service, dépend de choix politiques majeurs décidés loin des usagers et dans un tout autre contexte. Les acteurs des services correspondants, impliqués dans leurs métiers, ne sont généralement pas conscients de cette réalité. Le choix politique d’une mondialisation accrue exigera davantage la fin de l’universalité et le basculement vers le mode marchand. Le choix inverse d’un maintien des souverainetés par édification d’écluses entre nations commerçantes, facilitera d’autant plus le maintien de l’universalité que les relations d’agences seront substantiellement améliorées.

En toute honnêteté le futur dépendra aussi des ruptures technologiques qui peuvent demain nourrir le secteur et entrainer une énorme montée en gamme de la qualité de service. Mais il s’agit là d’un tout autre sujet sur lequel il faudrait beaucoup travailler.

 

[1] On pourra ici consulter : « Essai sur le Don. Forme et raison de l’échange dans les sociétés archaïques », in Sociologie et Anthropologie, paris, PUF, 1991.

[2] Quelle que soit concrètement la solution retenue : payer l’aidant ou recourir à un travail salarié dans le cadre d’une institution spécialisée du médico-social suppose toujours un prélèvement sur la société et ce même si l’espace marchand devient plus vaste. Pour les économistes comparer les PIB de 2 Pays n’a aucun sens et seuls les parties authentiquement marchandes des PIB peuvent donner lieu à des comparaisons porteuses de signification.

[3] Voir sur Wikipédia la théorie de l’agence ou sur Xerfi Canal l’intéressante vidéo de Philippe Gatef.

[4] Tarification à l’Activité. Voir plus loin.

[5] Il y a rendements décroissants quand le coût unitaire d’un même service augmente. Ainsi quand dans un établissement médico-social, il faut plus de personnel pour répondre  aux injonctions des régulateurs, il y en a moins pour le face à face avec les usagers. Pour autant il faut se méfier de conclusions rapides car en pratique mesurer l’évolution du rendement d’une politique publique est un exercice extraordinairement difficile en raison de l’évolution de la nature des besoins des personnes, une évolution qui est elle-même en rapport avec l’évolution des sciences et des techniques.

[6] Il est souvent dit qu’une religieuse à l’Hôpital fut historiquement remplacée par 3 infirmières.

[7] Notamment Guy Vallancien , président de la Convention on Health Analysis and management, CHAM.

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